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    La célèbre couverture évoquant l'arrestation et l'inculpation d'O. J. Simpson montre son visage noirci – littéralement : foncé. Cette manipulation de l'image (que l'on déduit à l'observation) fut immédiatement identifiée par le lectorat, car la même photographie d'identification policière qui avait servi de base à la couverture duTime, s'avéra la source de la couverture de Newsweek qui parut exactement le même jour, mais sans variation de son teint. La dramatisation des images par un jeu de contraste artificiel sur le clair-obscur n'avait alors rien de nouveau et se poursuit aujourd'hui dans toutes les pratiques photographiques amateurs et professionnelles. C'est une tonalité et une licence autorisées par l'usage, parce que ce jeu signe une interprétation et/ou une sensibilité à l'événement réel qui ne le fausserait pas.

    Le suspect, plus noir que de nature sur cette couverture, se rapprochait visuellement du coupable 

    Toutefois, cette manipulation du Time, à deux semaines des meurtres de Nicole Brown Simpson et Ronald Goldman, choqua et continue d'interpeller, parce que, dans ce cadre précis, ce jeu sur la lumière et l'ombre en était un d'amplification ethnicisante du suspect, de sur-racialisation – si l'on m'autorise ce néologisme – et, de fait, une forme visuelle de dénigrement, dans sa signification étymologique. En noircissant, non pas tant le tableau que le visage de Simpson, la gageure des éditeurs du Time reposait sur l'assomption commune, ou suffisamment généralisée, qui voulait que la noirceur fût considérée, en soi, un état moins honorable que la blancheur, si bien qu'assombrir un individu, c'était l'exposer à une moindre estime en termes de moralité. Par conséquent, le suspect, plus noir que de nature sur cette couverture, se rapprochait visuellement du coupable.

    Si Newsweek n'avait pas choisi la même photo, le même jour, mais sans la transformer, ce subterfuge aurait vraisemblablement abouti de manière imperceptible. Le tabou du racisme n'aurait pas été levé et une couche supplémentaire de préjugé se serait sédimentée dans la construction collective de la violence de l'homme noir.

     

     

    Source : https://www.lepoint.fr/culture/le-verdict-racial-de-l-image-retour-sur-les-affaires-rodney-king-et-o-j-simpson-01-10-2017-2161184_3.php


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